Les mains du miracle, Joseph Kessel

C’est une histoire vraie, aussi incroyable que méconnue, que l’on découvre grâce à Joseph Kessel. L’histoire du médecin (masseur, plus exactement) personnel de Himmler, qui parviendra, grâce à sa proximité avec le chef nazi et l’influence qu’il exerce auprès de lui, à sauver des milliers de victimes.

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La valse des arbres et du ciel, Jean-Michel Guenassia

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 Auvers-sur-Oise, été 1890. Marguerite Gachet est une jeune fille qui étouffe dans le carcan imposé aux femmes de cette fin de siècle. Elle sera le dernier amour de Van Gogh. Leur rencontre va bouleverser définitivement leurs vies. Jean-Michel Guenassia nous révèle une version stupéfiante de ces derniers jours. Et si le docteur Gachet n’avait pas été l’ami fidèle des impressionnistes mais plutôt un opportuniste cupide et vaniteux ? Et si sa fille avait été une personne trop passionnée et trop amoureuse ? Et si Van Gogh ne s’était pas suicidé ? Et si une partie de ses toiles exposées à Orsay étaient des faux ?

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Outre cette magnifique couverture, ce roman m’a tout de suite attirée par son sujet. J’adore les impressionnistes et Van Gogh est, avec Monet, un de mes peintres préférés (même si techniquement il ne fait pas partie de ce mouvement). Lors de mes vacances aux Pays-Bas l’été dernier, j’avais eu l’occasion de visiter le musée Van Gogh à Amsterdam et il est juste sublime ! Il rassemble la plus grande collection de ses oeuvres et on en apprend plus sur la vie de l’artiste. (bon, les Français se sont faits arnaquer car il a peint la quasi-totalité de ses oeuvres en France mais c’est les Néerlandais qui ont récupéré le musée, mais c’est comme ça 😉 )

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Le cas Eduard Einstein, de Laurent Seksik

En attendant de pouvoir lire les livres de la rentrée littéraire, je lis ceux de 2013 ! Voilà un livre donc j’avais entendu parler au moment de sa sortie comme celui qui attaquait le mythe d’Einstein en se penchant sur sa vie familiale.

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Entre fiction et biographie, Robert Seksik nous plonge dans l’intimité d’Einstein et de sa famille. Plutôt que de parler de l’homme illustre, il choisit de raconter l’histoire d’un inconnu : Eduard Einstein. A 20 ans, le jeune homme est interné dans un hôpital psychiatrique et y passera le reste de ses jours, seul et malade. Sa mère, divorcée, fait de son mieux pour veiller sur son fils. Le grand Albert a coupé les ponts puis part en exil aux Etats-Unis pour fuir le nazisme. Culpabilité, impuissance et honte d’un côté, ressentiment et haine de l’autre, la séparation entre le père et le fils sera définitive.

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Avec Le cas Eduard Einstein, on découvre l’histoire non seulement du fils mais de toute la famille Einstein. Le récit alterne trois points de vue : celui d’Eduard, celui de Mileva, sa mère, et celui d’Albert Einstein, tous frappés par le même drame, la maladie.

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Manderley for ever, Tatiana de Rosnay

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Si vous suivez un peu le blog, vous avez du remarquer mon immense coup de cœur pour Rebecca, le roman le plus connu de Daphné du Maurier. Après être tombée sous le charme de cette auteur, je n’avais qu’une envie : lire ses autres romans et en savoir plus sur elle. Cela tombait bien puisque ma mère, en m’offrant Rebecca, m’avait offert en même temps la biographie de Daphné du Maurier ! La coïncidence veut que je vous fasse la chronique (avec presque un mois de retard…) au moment où une nouvelle édition est sortie, avec de nouvelles photos que je n’ai malheureusement pas pu voir

Le livre de Tatiana de Rosnay commence dès le titre par un écho à la célèbre phrase de Rebecca : « Aujourd’hui, j’ai rêvé que je retournais à Manderley. » L’auteur tient sa promesse pour la suite, alternant sans cesse entre la femme et ses œuvres.

Je ne suis absolument pas une habituée des biographies. A vrai dire, d’aussi loin que je m’en souvienne, c’est peut-être la première que je lis. Les clichés qui entourent ce genre me le rendaient assez rédhibitoire : poussiéreux, monotone, ennuyant… Ce n’est pas parce qu’on aime les livres d’un auteur que l’on a envie de connaître sa vie. D’ailleurs, la plupart des écrivains ont une vie tout à fait banale ou inintéressante. Le risque, aussi, en lisant la biographie d’un auteur que l’on adore, est d’être déçu : un écrivain reste un homme, avec ses défauts et ses erreurs, loin du mythe que l’on s’imagine dans sa tête.

Bref, je suis finalement bien contente d’avoir découvert la biographie de Daphné du Maurier par Tatiana de Rosnay, surtout que je ne l’aurais jamais acheté par moi-même !

Justement, malgré les quelques 400 pages, Tatiana de Rosnay ne nous ennuie pas. Il se trouve que je ne connaissais pas du tout la vie de Daphné du Maurier, la surprise a donc été totale. L’auteur dévoile le portrait d’une femme fascinante et troublante. Les photos présentes dans le livre permettent de mieux se représenter l’écrivain et sa famille, ainsi que les lieux où elle vivait.

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Daphné à Ferryside

L’originalité de cette biographie est que Tatiana de Rosnay a choisi d’entrer dans la vie de Daphné du Maurier par des lieux symboliques de sa vie. Chaque grande partie du livre s’ouvre ainsi sur la description actuelle d’une maison où a grandi ou vécu Daphné du Maurier, et devant laquelle se rend l’auteur, en pèlerinage. Si cette particularité a le mérite de mettre en avant l’importance de certains lieux pour lesquels Daphné du Maurier éprouvait une affection presque humaine, j’ai trouvé les descriptions un peu fades.

Tout en suivant évidemment une trame chronologique, l’auteur fait quelques fois des allers-retours dans le temps, pour dynamiser son récit et amener un peu de suspens. Croyez-le ou non, bien que l’on ne retrouve pas les péripéties d’un roman, la vie de Daphné du Maurier (ou du moins la manière dont elle est racontée) comporte sa part de rebondissements !

L’auteur évite les défauts d’une biographie trop froide ou impersonnelle, en prenant le parti de se mettre dans la peau de Daphné. Malgré des interprétations personnelles des pensées de l’écrivain (qui ne sont pas forcément réelles), cela a le mérite de nous plonger dans l’intimité de Daphné. On s’habitue à sa manière d’être et de penser. A la fin, on a presque l’impression de l’avoir connue. On découvre ses habitudes, ses secrets, ses faiblesses. On la suit dans le foyer de son enfance, avec la relation particulière à son père. L’auteur a recueilli des témoignages de la famille Du Maurier, ce qui lui a permis d’avoir une retranscription fidèle de leur quotidien : par exemple, on trouve une liste du langage codé qu’utilisaient les enfants Du Maurier entre eux (« menace » pour dire être attiré par un homme, « Robert » pour les menstruations, etc).

Le must reste que cette biographie nous permet de faire le lien entre la femme et ses écrits. Après l’avoir lu, on comprend mieux où Daphné a trouvé l’inspiration et pourquoi elle a écrit tel roman, à tel moment. On y découvre les premiers écrits de Daphné, très noirs et assez sordides. On apprend que Daphné avait toujours voulu être un garçon (depuis que son père lui a fait sentir qu’il aurait adoré avoir un fils au lieu de trois filles) et s’était crée un alter-ego masculin. Elle avait d’ailleurs une attirance pour les femmes et a eu une longue liaison avec une de ses proches, bien qu’elle ait toujours réfuté être homosexuelle. Elle avait une grande passion pour le bateau et pour la Cornouailles, ainsi que pour la France. Tous ces thèmes se retrouvent dans ses romans, même si Tatiana de Rosnay semble parfois un peu trop forcer le lien de causalité entre la vie de l’auteur et le scénario de ses livres.

« Voilà comment se nourrissent les romans, d’ardeurs et d’obsessions, tout ce qu’on ne peut exposer au monde extérieur au risque de passer pour une démente, tout ce que ces abrutis de juges n’ont jamais su, ni anticipé, tout ce qui se trame dans l’âme des écrivains, fragments de vérité et de fantasmes, argile personnelle façonnée et pétrie à souhait dans les dédales d’un labyrinthe de l’intime interdit aux visiteurs et aux curieux. »

On a également accès aux coulisses du métier d’écrivain et aux contrecoups du talent : le travail ardu, la solitude nécessaire et voulue, le besoin de liberté, le peu d’affection de Daphné pour ses enfants, la difficulté d’écrire d’autres romans après un best-seller… J’ai été aussi surprise d’apprendre que Daphné détestait plus ou moins Hitchcock, qui a adapté la majorité de ses livres à l’écran, la plupart du temps sans respecter l’oeuvre originale !

Finalement, on comprend que la vie de Daphné a été comme sa personnalité : complexe et pas toujours heureuse. Celle qui s’est souvent sentie en décalage et qui refusait d’écrire pour plaire avait une part sombre qu’elle n’a jamais pu vaincre. On apprend son mariage et sa décadence, avec un brillant officier qui fut cependant marqué par les horreurs de la guerre et que le devoir a longtemps tenu éloigné d’elle. Le livre est souvent mélancolique, notamment quand il parle du couple, de la famille ou de la vieillesse. J’ai d’ailleurs trouvé dommage que Tatiana de Rosnay relate sa vie jusqu’à sa mort : la dernière partie est moins intéressante et nous laisse une vision peu favorable d’une pauvre vieille dame qui ne supportait pas la déchéance imposée par le temps.

J’espère que cet aperçu pour vous donnera envie de découvrir le reste !

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En bref, Tatiana de Rosnay tient son pari en nous offrant une biographie riche et prenante, pas toujours tendre mais sous laquelle percent son affection et son admiration pour l’auteur. On y découvre la personnalité de Daphné du Maurier et mille autres chose surprenantes. Au-delà de sa vie, elle nous parle de sujets universels : l’écriture, l’émancipation des femmes, le bonheur, la famille, la vieillesse… A la fermeture du livre, vous ne pourrez pas vous empêcher de consulter tous les romans de l’écrivain pour faire le parallèle. J’ai appris que Daphné du Maurier avait écrit elle même son autobiographie : la comparaison mériterait d’être faite, pour voir ce qu’apporte Manderley for ever.

PS : La biographie est très riche en informations, y compris sur la famille Du Maurier. Je ne mentionnerais pas tout mais je citerais quelques éléments qui m’ont marquée : le fait que son père était un acteur de théâtre très connu de son époque et surprotecteur ; l’insuccès tragique de sa sœur qui a toute sa vie tenté de percer dans l’écriture mais qui a souffert de l’ombre de la célèbre Daphné ;  le fait que son grand-père, George du Maurier, était un écrivain célèbre, et le pourquoi de ses origines françaises (j’avais été particulièrement intriguée par ce nom très frenchie de « Du Maurier » !).


Verdict Un bon moment

Edition : Albin Michel – 460 pages – Année de parution : 2015