Pax et le petit soldat, Sara Pennypacker

couv52333992La guerre est imminente. Lorsque le père de Peter s’engage dans l’armée, il oblige son fils à abandonner Pax, le renard qu’il a élevé depuis le plus jeune âge et envoie le garçon vivre chez son grand-père à cinq cent kilomètres de là. Mais Peter s’enfuit à la recherche de son renard. Pendant ce temps, Pax affronte seul les dangers d’une nature sauvage et se trouve confronté à ceux de son espèce.

* * *

Pax et le petit soldat, c’est le roman que l’on retrouve dans toutes les sélections jeunesse du moment. Il fait d’ailleurs partie de celle du Prix des chroniqueurs Web et j’ai décidé de le découvrir. Verdict : une belle pépite !

On a là un très beau roman, plein de poésie, sur la force de l’amitié et la relation si particulière que les enfants (et plus généralement les humains) peuvent entretenir avec les animaux. Contrairement au discours des adultes qui lui assurent que c’est « juste » un renard et qu’ils ne peuvent pas le garder, Peter a développé une réelle complicité avec Pax. Et il est prêt à tout, au-delà du raisonnable, au-delà même de ses capacités, pour retrouver son ami… Il décide donc de désobéir à son père et de partir à sa recherche à travers le pays. Le garçon comme le renard sont très touchants. Ils sont tous les deux l’incarnation de l’innocence et vont devoir affronter la réalité brutale du monde. Peter fait preuve d’un courage et d’une détermination à toute épreuve. Son aventure et sa rencontre avec Vola nous donneront une belle leçon : faire ce qui nous semble juste et se battre pour ce en quoi l’on croit.

On sent la maturité de l’auteur dans l’écriture et la construction du roman. En postface, elle explique son projet et ce qui l’a amenée à écrire ce livre sur les ravages de la guerre sous le prisme d’un animal, et il est intéressant de voir son cheminement. Le personnage du renard m’a rappelé le sage-animal des contes philosophiques. Le livre s’apprécie ainsi à deux niveaux : d’une part, celui de la nature et de la relation à l’animal, et d’autre part celui de la guerre.

Le deuxième aspect m’a peut-être moins convaincue. On se situe dans un cadre géographique et temporel volontairement abstrait. Le message antimilitariste est très présent et un peu trop univoque/simpliste à mon goût. Alors je me dis que le roman s’adresse à des enfants et qu’il reflète aussi probablement les convictions de l’auteur. Néanmoins, il me semble que les choses ne sont jamais aussi simples et que parfois la guerre s’impose d’elle-même lorsque les négociations échouent, en particulier en réaction à une agression ou à des massacres de population par exemple. Mais bref, passons.

Le roman alterne les points de vue du renard et de « son » garçon, et inversement. Ces moments dans la peau d’un renard sont idéaux pour renverser nos perspectives. De manière très terre-à-terre, j’ai aimé en apprendre sur le mode de vie des renards, leur « caractère », leur intelligence, leurs habitudes (chasse, rapport aux autres membres de l’espèce…). Bien entendu, au-delà de ça, le réel intérêt des renards dans l’histoire est d’émettre un point de vue critique sur les humains, ces « malades de guerre ». A travers le regard des renards, ils deviennent les destructeurs, ceux qui sont capables de tromper, de mentir, de haïr leurs semblables. Un comportement incompréhensible pour les animaux qui font preuve de beaucoup plus de simplicité dans le rapport à l’autre et ont finalement une vision des choses nettement plus saine. L’auteur évoque ainsi le rapport à la nature, l’impact de l’homme sur la faune et la flore et les dommages collatéraux causés par les mines et les armes.

Sara Pennypacker signe donc un livre fort qui porte un vrai message. J’ai eu le sentiment qu’il faisait honneur à l’intelligence des enfants en leur offrant une réflexion sur la guerre. La preuve que la littérature jeunesse n’est pas que « ludique ».

* * *

En bref, un roman jeunesse original, avec un message écologique et pacifique puissant, mais aussi un ode à l’amitié. Sans doute les hommes devraient-ils s’inspirer plus souvent des enfants et des animaux…Verdict Un bon moment

[Lu dans le cadre du Prix littéraire des chroniqueurs Web]