La dernière réunion des filles de la station-service, Fannie Flagg

Je suis heureuse d’avoir retrouvé Fannie Flagg avec La dernière réunion des filles de la station-service, près de 7 ans après Beignets de tomates vertes. Et je crois bien que j’ai préféré celui-ci !

On retrouve dans ce roman le style inimitable de Fannie Flagg, qui sait si bien dépeindre la vie des petites villes américaines.

L’histoire débute à l’époque contemporaine. Sookie, 59 ans, savoure sa tranquillité alors que sa dernière fille vient de se marier. Seule ombre au tableau, Lenore, sa mère, une femme extravagante qui n’a jamais été tendre avec elle et lui mène toujours la vie dure, entre ses remarques cinglante et ses frasques qu’elle doit rattraper. Le début du roman ne raconte rien de spécial et m’a pourtant tout de suite plu. L’auteure a un talent certain pour installer une ambiance, nous plonger dans la vie de quartier et dessiner des personnages attachants.

Le récit prend de l’envergure lorsque Sookie reçoit une mystérieuse lettre, qui bouleverse tout ce qu’elle pensait savoir sur sa vie. Ces révélations vont l’amener à se questionner non seulement sur sa famille, mais aussi sur son identité, puisqu’elles remettent en cause tout ce sur quoi elle s’est construite. Le cheminement de Sookie est intéressant car il est avant tout celui d’une femme de 60 ans qui s’interroge sur sa vie, sur ses accomplissements et la perception que les autres ont d’elle. Je l’ai trouvé très touchante, avec sa gentillesse, sa douceur, son amour pour ses enfants et son mari, l’aide qu’elle apporte à sa mère malgré le comportement de celle-ci. Surtout, son manque d’estime de soi, dû aux exigences et aux critiques de sa mère, nous donne envie de la réconforter.

Néanmoins, si le roman commence comme une histoire de secret de famille et une quête des origines, il s’agit en réalité d’un prétexte pour découvrir l’histoire incroyable de la famille Jurdabralinski, d’origine polonaise et installée à Pulaski, Wisconsin, et des premières femmes aviatrices.

Grâce à Fannie Flagg, j’ai ainsi appris existence des WASP (Women Airforce Service Pilots), pilotes féminines de l’Armée de l’air américaine pendant la Seconde guerre mondiale. Leur histoire est aussi passionnante que méconnue. Pendant la guerre, les Etats-Unis ont en effet fait appel à des femmes détentrices d’un brevet de pilote civil pour conduire les avions des entrepôts de fabrication aux bases militaires, afin de libérer des pilotes masculins pour le front. La dernière réunion des filles de la station-service présente ainsi un intérêt historique et rend hommage à ces grandes oubliées de l’Histoire, qui n’ont obtenu aucune reconnaissance de l’armée, que ce soit pendant la guerre ou à la fin de celle-ci (il faudra attendre les années 70 pour que l’armée de l’air s’ouvre de nouveau aux femmes).

Parmi elles, nous faisons la connaissance de Fritzi, une femme au caractère affirmé et à l’âme d’aventurière, qui a débuté par les spectacles aériens avant de rejoindre les WASP. Sa modernité, son goût pour la liberté et son audace en font un personnage à part, qui donne une tonalité féministe au roman. A travers la famille Jurdabralinski, Fannie Flagg met également en avant l’effort de guerre américain et le vécu des civils pendant la Seconde guerre mondiale.

Les deux époques se mêlent habilement tout au long du roman, et – chose rare – j’ai tout autant aimé suivre les aventures des filles Jurdabralinski que les déboires de Sookie. J’avoue avoir été bien surprise par les révélations finales, alors que le dénouement semblait toute tracé. Seul bémol, la fin m’a paru un peu longue, les cinquante dernières pages ayant un air d’épilogue qui n’en finit pas.

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