Les filles au lion, Jessie Burton

couv27039131.jpgEn 1967, cela fait déjà quelques années qu’Odelle, originaire des Caraïbes, vit à Londres. Elle travaille dans un magasin de chaussures mais elle s’y ennuie, et rêve de devenir écrivain. Et voilà que sa candidature à un poste de dactylo dans une galerie d’art est acceptée ; un emploi qui pourrait bien changer sa vie. Dès lors, elle se met au service de Marjorie Quick, un personnage haut en couleur qui la pousse à écrire. Elle rencontre aussi Lawrie Scott, un jeune homme charmant qui possède un magnifique tableau représentant deux jeunes femmes et un lion. De ce tableau il ne sait rien, si ce n’est qu’il appartenait à sa mère. Marjorie Quick, à qui il soumet la mystérieuse toile, a l’air d’en savoir plus qu’elle ne veut bien le dire, ce qui pique la curiosité d’Odelle. La jeune femme décide de déchiffrer l’énigme des Filles au lion. Sa quête va révéler une histoire d’amour et d’ambition enfouie au cœur de l’Andalousie des années trente, alors que la guerre d’Espagne s’apprête à faire rage.

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Comme souvent, j’ai démarré ma lecture sans savoir du tout de quoi elle parlait. J’avais lu Miniaturiste du même auteur et j’étais curieuse de découvrir son nouveau roman. J’en ressors assez mitigée, mais sans doute est-ce moins lié au roman qu’à mon expérience de lecture. Peut-être parce que le sujet n’était pas fait pour moi ou que j’en attendais trop.

Dans Les filles au lion, on reste dans l’historique mais on se place dans un tout autre cadre que celui du roman précédent. On quitte les Provinces-Unies (Pays-Bas) du XVIIème pour l’Angleterre et l’Espagne du XXème.

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Pour qui sonne le glas, Ernest Hemingway

Pour qui sonne le glas a eu pour moi le charme d’une vieille édition jaunie trouvée dans la bibliothèque parentale. J’ai eu un certain plaisir à découvrir totalement l’histoire puisque mon édition ne comportait pas de résumé sur la 4ème de couverture. Je n’avais aucune idée de l’intrigue, si ce n’est que cela se passait pendant la guerre d’Espagne. Il s’agissait de mon premier roman d’Hemingway : il était temps de découvrir cette grande figure de la littérature américaine !


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Pour qui sonne le glas est inspiré du vécu d’Ernest Hemingway en tant que journaliste pendant la guerre civile espagnole. Un jeune professeur américain, Robert Jordan, engagé dans les Brigades internationales, est envoyé en Castille par le général Golz pour faire sauter un pont. Une offensive républicaine étant imminente, ce pont doit être détruit dès le déclenchement de l’attaque pour couper la route aux troupes de renforts franquistes. Pour y arriver, Robert Jordan rejoint un groupe de partisans derrière les lignes, cachés dans les montagnes. 

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Je voudrais d’abord vous prévenir de ne pas faire la même méprise que moi. Je pensais que l’attaque du pont était l’affaire d’un ou deux chapitres, et qu’on suivait ensuite les personnages dans les affres de la guerre, un peu comme une fresque. En réalité, ce roman a la particularité d’avoir une unité d’action et de temps très réduites : sur quelques jours, Hemingway raconte les étapes de la préparation de l’attaque, avec tout le repérage, les discussions, les imprévus, jusqu’au déroulement de l’attaque qui clôt le livre.

Mais finalement, malgré ce sujet qui peut rebuter, le roman n’est pas ennuyant ni monotone, avant tout grâce au charme de ses personnages qui ont chacun une identité et une histoire. Robert Jordan, Américain engagé aux côtés des guerilleros et passé maître dans l’art de faire sauter les ponts, témoigne, à travers son récit et ses pensées, de la complexité de la situation et des tensions entre sa volonté et son devoir. Maria, jeune fille violentée et tondue par les fascistes, recueillie ensuite par les partisans, est un personnage touchant dont le comportement est marqué par les épreuves qu’elle a vécues.

J’ai peiné, cependant, lors de certains passages moins intéressants, en particulier en milieu de lecture. Je vous conseille de ne pas hésiter à passer vite sur ces moments pour ne pas vous décourager !

Pour qui sonne le glas nous fait découvrir la guerre d’Espagne et donne envie de s’y intéresser. L’auteur raconte aussi l’Espagne, l’esprit si particulier des ses habitants, la foi et les corridas, le caractère des femmes. On a ainsi le point de vue d’un Américain sur le peuple espagnol et leur culture, forme d’hommage sans en être un.

Hemingway nous parle surtout de la guerre, de ses horreurs, du sacrifice pour la cause ou pour ses camarades. De l’action de guerilla, dans la peau d’un petit groupe perdu dans les montagnes qui n’a aucune idée de ce qui se trame mais qui a envie d’action contre les fascistes. Des officiers qui imaginent des plans, et de la tragédie pour ceux qui doivent l’appliquer avec tous les risques et les conséquences. De comment une attaque ne se passe jamais comme prévu, à cause de l’amateurisme, de la désobéissance, du bavardage, de la trahison, des caprices, de la météo ou simplement de la faute à pas de chance.

« S’il faut mourir, songeait-il, et c’est clair qu’il le faut, je peux mourir. Mais je déteste ça. Mourir n’était rien, et il ne s’en faisait aucune peinture terrifiante. Mais vivre, c’était un champ de blé balancé par vent au flanc d’un coteau. Vivre, c’était un faucon dans le ciel. Vivre, c’était une cruche d’eau dans la poussière du grain battu et l’envol de la balle. Vivre, c’était un cheval entre les jambes, une carabine dans les fontes, et une colline, et une vallée, et un ruisseau bordé d’arbres, et l’autre bord de la vallée avec, au loin, d’autres collines. »

Il nous fait réfléchir sur la justice en guerre, le droit ou non de tuer, la difficile définition de l’ennemi en guerre civile – lorsqu’un paysan est fasciste sans y croire parce que tout le monde l’est ou par peur des représailles, lorsque qu’une femme se fait abattre parce qu’elle a eu le malheur d’avoir un mari républicain, lorsque celui qui tient la mitrailleuse en face est un jeune de 20 ans du village d’à côté. « A la guerre, on ne tue jamais ceux qu’on voudrait. » Les combattants ne sont pas forcément de fervents communistes.

Mais surtout, c’est un livre qui parle d’amour, et de manière assez bouleversante. Comment vivre l’histoire de sa vie en trois jours, quand l’on sait que l’on ne survivra peut-être pas davantage ? Se concentrer sur l’intensité des retrouvailles de chaque soir, s’efforcer de croire à ses rêves et à ses projets d’avenir, se promettre et se protéger. Ne pas pleurer sur son sort mais se dire que, finalement, la chance est d’avoir connu ce que la plupart des hommes ne connaîtront jamais : le vrai amour. J’ai pu être gênée par moment par la soumission et le dévouement total de la femme envers son homme, mais l’époque et la particularité d’un personnage innocent et naïf l’expliquent peut-être.

« Et autre chose. Ne te bourre jamais le crâne sur ton amour pour quelqu’un. C’est seulement que la plupart des gens n’ont pas la chance d’avoir ça. Tu n’avais jamais eu ça avant, et maintenant tu l’as. Ce qui t’arrive avec Maria, que cela ne dure qu’aujourd’hui et une partie de demain, ou que cela dure toute la vie, c’est la chose la plus importante qui puisse arriver à un être humain. Il y aura toujours des gens pour dire que ça n’existe pas, parce qu’ils n’ont pas pu l’avoir. Mais, moi, je te dis que c’est vrai et que tu as de la chance, même si tu meurs demain. »

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En bref : un beau roman sur la guerre, le devoir et l’amour, qui nous plonge dans l’Espagne des années 1930. Malgré quelques passages longuets, les réflexions apportées par Hemingway valent le détour !