PERDUE. Quand Laurel Logan, 6 ans, a été kidnappée, seule sa petite sœur en a été témoin. Toute l’enfance de Faith a été façonnée par la disparition de Laurel : de la séparation de ses parents à la présence constante des médias, en passant par celle de ces soi-disant amis qui ne veulent que lui parler de sa sœur.
RETROUVÉE. Treize ans plus tard, une jeune femme est retrouvée dans le jardin de l’ancienne maison des Logan, totalement déboussolée et serrant dans ses bras l’ours en peluche avec lequel Laurel a disparu. Laurel est enfin de retour chez elle, saine et sauve. Faith avait toujours rêvé de revoir sa sœur, sans oser vraiment croire que cela arriverait. Mais une série troublante d’événements isole Faith et la pousse à la paranoïa : ce que l’on a perdu peut-il réellement être retrouvé ?
* * *
J’ai lu ce roman il y a deux mois, mais heureusement j’avais pris des notes pour pouvoir vous en parler ! Je ne pouvais décemment pas mettre de côté un livre qui a frôlé le coup de cœur !
J’avais repéré le titre parmi les nombreux romans ados de Cat Clarke sur le stand Robert Laffont au Salon du livre de Montreuil. Bien que le résumé assez tapageur me faisait douter, l’intrigue avait soulevé ma curiosité. J’ai bien fait, car j’ai été très agréablement surprise, à la fois par l’écriture de l’auteur et par l’histoire. Ce n’est pas seulement prenant comme peuvent l’être d’autres romans Young adult qui se lisent bien mais qui ont des faiblesses. Perdue et retrouvée aborde de vrais sujets, tels que les relations au sein de la fratrie ou les médias.
Il est assez rare de trouver des thriller dans la littérature ado, et Cat Clarke a parfaitement réussi le mélange des genres. Le roman s’ouvre sur ce qui semble être un miracle : après 13 ans de disparition, la police annonce à la famille Logan qu’ils ont retrouvé Laurel, leur fille enlevée à l’âge de 6 ans. Mais passée l’euphorie des premiers instants, il faut bien admettre que tout ne se passe pas pour le mieux. Ce retour que tous ont désiré n’est pas aussi idéal que prévu. Laurel n’est plus la fillette dont les autres gardaient le souvenir ; elle est devenue une jeune fille, une inconnue.
Ce que j’ai aimé dans Perdue et retrouvée, c’est qu’il ne tombe pas dans les clichés. Le sujet au cœur du roman n’est pas tant celui de la disparition ou de l’identité de Laurel que celui de la difficulté du retour. Après tant d’années de séparation, comment réapprendre à vivre ensemble ? Comme former de nouveau une famille, comment être une sœur et des parents normaux ? De l’autre côté, les horreurs qu’a subies Laurel lui ont laissé un profond traumatisme qu’elle doit gérer. Elle doit également réapprendre les choses basiques de la vie quotidienne car son ravisseur l’a privée de son enfance et de son adolescence, deux périodes charnières pour se construire.
L’auteur s’attarde particulièrement sur la relation entre les deux sœurs, puisque le récit est raconté par la voix de Faith, la sœur de Laurel. La situation est dure à vivre pour Faith dont la vie a, jusqu’à présent, toujours tourné autour de sa sœur disparue. Les choses se compliquent lorsque le retour de Laurel bouleverse complètement le quotidien de la famille. Comment réapprivoiser cette sœur presque inconnue, malgré tous les moments qu’elles n’ont pas partagés ? Et si elles ne s’entendaient pas ? Au fil des jours, Faith ne peut s’empêcher de ressentir de la jalousie face à toute l’attention tournée vers Laurel. Et même si elle souhaite construire une vraie relation fraternelle avec sa sœur, elle ne veut pas non plus passer tout son temps avec elle. Elle veut aussi exister sans Laurel, avoir sa propre vie, ses copains, son petit ami. En même temps, elle se sent coupable de ne pas ressentir que de la joie face au retour de sa sœur.
L’expérience des parents est également parfaitement décrite. L’auteur montre bien le traumatisme de la disparition d’un enfant, qui marque ensuite la relation avec l’enfant retrouvé. Les parents ne peuvent se défaire de la peur que Laurel disparaisse à nouveau ou qu’il lui arrive quelque chose. Faith ne supporte pas de voir sa mère faire comme si tout allait bien et tenter, maladroitement, de rattraper le temps perdu, en étant aux petits soins avec Laurel, en lui cuisinant des petits plats, en l’emmenant faire des virées shopping. Les tensions s’accroissent car Faith est la première à se rendre compte que Laurel est loin d’être une sainte, alors que tout le monde lui pardonne son comportement et la traite comme la fille parfaite. Finalement, la réaction de la mère semble assez malsaine car son amour pour Laurel et son désir que les choses s’arrangent l’empêchent de voir ce qui ne va pas.
Enfin, le roman pose la question de la couverture médiatique et de la curiosité malsaine des médias et du public pour les « faits divers » : les journalistes qui prennent d’assaut la maison ; le téléphone qui ne cesse de sonner pour des demandes d’interview ; le besoin pour les parents de jouer le jeu des médias pour que l’on parle de l’affaire et que leur fille disparue ne soit pas oubliée… Une fois Laurel revenue, le balai des caméras reprend ; les télés et les journaux sont fascinés par ce miracle et, quelque part, compliquent le retour à la normalité. Cat Clarke soulève aussi l’épineux problème de l’inégalité des couvertures médiatiques, c’est-à-dire que toutes les disparitions ne sont pas médiatisées de la même façon, selon l’origine sociale ou ethnique de l’enfant.
Au-delà du sujet de départ, c’est donc pour les thématiques abordées et les sentiments ambivalents des personnages que j’ai aimé le roman. Une fois lancée dans ma lecture, impossible de le lâcher ! Les dysfonctionnements au sein de la famille prennent de plus en plus d’ampleur et la tension monte, faisant pressentir un drame. Perdue et retrouvée saura capter votre attention et vous réserve des rebondissements inattendus !
* * *
En bref, un roman passionnant sur le difficile retour d’une enfant disparue dans sa famille. Cat Clarke a su dépeindre la complexité de la situation et la psychologie des personnages, tout en alimentant le suspens.
Pingback: Ne vous fiez pas aux apparences – Ces couvertures moches |