Le liseur, de Bernhard Schlink

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En rentrant du lycée, Michaël, 15 ans,  fait par hasard la connaissance d’Hanna, une femme de trente-cinq ans dont il devient l’amant. Pendant six mois, il la rejoint chez elle tous les jours, et l’un de leurs rites consiste à ce qu’il lui fasse la lecture à haute voix. Mais cette femme reste mystérieuse et imprévisible…jusqu’à ce qu’elle disparaisse du jour au lendemain. Sept ans plus tard, Michaël assiste, dans le cadre de des études de droit, au procès de cinq criminelles et reconnaît Hanna parmi elles. Quel secret cachait-t-elle durant toutes ces années ?

* * * 

 Voilà un livre qui date un peu (1995) et qu’on ne présente plus, surtout grâce au film ! Et pourtant, je n’avais jamais lu le roman de Bernhard Schlink ni vu son adaptation au cinéma. Je dirais que le problème est presque que l’histoire du Liseur est trop connue : cela gâche un peu la lecture en enlevant tout l’intérêt des révélations sur les personnages.

Au-delà de ce premier bémol, Le liseur est avant tout une histoire d’amour forte. L’auteur nous conte les émois et les sensations du premier amour, la découverte des sentiments et des corps, l’inexpérience qui pousse au déraisonnable. Michaël éprouve d’emblée une fascination maladive pour Hanna, une obsession qui se transforme vite en désir pour cette femme plus âgée. J’avoue avoir été un peu agacée par l’adoration totale de l’adolescent pour Hanna. Je n’ai pu me défaire du malaise provoqué par la différence d’âge et le déséquilibre évident de leur relation, puisque Hanna me semblait profiter de son jeune âge et de sa naïveté pour faire ce qu’elle voulait de lui.  Michaël, prêt à tout pour passer du temps auprès de la femme dont il est fou amoureux, se plie à ses moindres désirs et supporte tous ses caprices et ses humeurs.

La figure d’Hanna est assez perturbante. Froide, détachée, elle restera pour le garçon comme pour le lecteur un mystère. J’ai eu du mal à adhérer au personnage, à la cerner, à la comprendre. L’écriture de l’auteur ne nous aide pas vraiment. Le ton est en effet assez particulier, c’est celui du narrateur, mélancolique, qui revient sur son expérience et nous livre ses pensées sur son vécu. Michaël, analysant son propre comportement dans le passé, s’exprime avec un certain recul qui empêche de se sentir réellement proche des émotions du personnage. Surtout, je regrette que le livre soit si court – l’intrigue avance d’ailleurs assez vite, parfois par à-coup. La fin  laisse un grand nombre de questions sans réponse.

Néanmoins, à partir de la révélation du secret d’Hanna, le récit prend une autre tournure. On ne peut que reconnaître la beauté (tragique) de l’amour de Michaël qui, des années après, s’efforce toujours de comprendre la femme qu’il a aimé (et qu’il aime encore ?). Malgré les apparences, il tente d’expliquer sans trop juger et de retrouver en Hanna la femme qu’il a connu. Il développe ses réflexions sur le bien et le mal, se demande jusqu’où une personne est prête à aller pour préserver son image et échapper à la honte. On comprend que Michaël n’a jamais été heureux après Hanna. Et c’est cet amour, tout comme l’insondable et l’obstination d’Hanna, qui donnent toute son intensité et sa profondeur au livre.

Enfin, le roman aborde également le difficile rapport que l’Allemagne entretient avec son passé et le conflit de générations qui suit la 2ème guerre mondiale. Il met en scène une jeune génération accusant ses parents de leur implication dans le nazisme, questionnant, cherchant à se détacher de cette histoire honteuse tout en tentant de comprendre.

Pourquoi ? Pourquoi ce qui était beau nous parait rétrospectivement détérioré parce que cela dissimulait de vilaines vérités ? Pourquoi le souvenir d’années de mariage heureux est-il gâché lorsque l’on découvre que, pendant tout ce temps, l’autre avait un amant ? Parce qu’on ne saurait être heureux dans une situation pareille ? Mais on était heureux ! Parfois le souvenir n’est déjà plus fidèle au bonheur quand la fin fut douloureuse. Parce que le bonheur n’est pas vrai s’il ne dure pas éternellement ? Parce que ne peut finir douloureusement que ce qui était douloureux, inconsciemment et sans qu’on le sût ? »

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En bref, Le liseur aborde des thèmes profonds (l’amour, le bien et le mal, le nazisme etc) et bouscule le lecteur avec le personnage d’Hanna, dérangeant autant qu’intriguant. Il m’est difficile d’évaluer mon appréciation sur ce roman ; je ne saurais trop vous dire ce que j’en ai ou non aimé et à quel degré. Dans tous les cas, il a ce quelque chose de particulier qui justifie qu’on le lise.

Verdict Un bon moment

18 réflexions sur “Le liseur, de Bernhard Schlink

  1. Je n’ai vu que l’adaptation cinématographique, et je me souviens très bien avoir été stupéfaite devant le final ! Je ne sais pas si je lirai la version littéraire, j’ai un peu peur que cela gâche le ressenti que j’ai en mémoire sur cette histoire. On verra bien ! En tout cas, j’espère que tu auras l’occasion de voir le film. Le personnage d’Hanna reste très énigmatique, mais Kate Winslet est formidable dans ce rôle !

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  2. Je ne connaissais que le titre et je savais qu’il y avait une adaptation cinématographique, mais ça s’arrête là… Shame…
    Ta chronique en tout cas me donne fortement envie de découvrir cette oeuvre ! Je note, je pense que je l’emprunterais à la bibliothèque. c:

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